dimanche 4 septembre 2011

UMP : après Joly la Norvégienne, Placé, « notre Coréen national »

Alain Marleix (UMP), a raillé le Vert Jean-Vincent Placé, « notre Coréen national ». Des propos que « regrette » Jean-François Copé.
 
Il y a eu l'Auvergnat de Brice Hortefeux et la Norvégienne de François Fillon ; voici le Coréen d'Alain Marleix, le spécialiste du découpage électoral à l'UMP, à propos de l'écologiste Jean-Vincent Placé. Les journées d'été du parti commencent fort.

L'interview recueillie par Public Sénat est anodine, elle porte sur ses pronostics pour les élections sénatoriales à venir : l'ancien secrétaire d'Etat Alain Marleix n'est pas inquiet pour son parti. Mais soudain, il a ces mots :

« Dans l'Essonne, […] notre Coréen national, Jean-Vincent Placé, va avoir chaud aux plumes. »

A priori, aucune raison à cette sortie, au contraire de Fillon qui avait dérapé en répondant aux critiques d'Eva Joly sur le 14 Juillet. Sauf si l'on connaît le visage de Jean-Vincent Placé, et que l'on sait qu'il est né à Séoul et a été adopté.

Jean-Vincent Placé, candidat aux sénatoriales et conseiller politique de Cécile Duflot, réagit auprès de Rue89 :

« C'est un scandale absolu, et je suis rarement scandalisé. Aujourd'hui il s'agit de moi, mais demain il dira de Manuel Valls “notre Espagnol national” ou de Rachida Dati “notre Marocaine nationale”, ou encore de Rama Yade “notre Sénégalaise nationale”.

Je pense à mes parents [adoptifs, ndlr]. Le fait d'être coréen n'est bien sûr pas une infamie. Mais tout simplement, je suis français depuis 34 ans et uniquement français. »

Comme tous les enfants adoptés sous forme plénière, Jean-Vincent Placé est français par filiation. La loi française dit même qu'il est « réputé être né français ». Contrairement aux premiers commentaires suscités par la sortie de Marleix, Placé n'est pas « naturalisé » (comme l'est par exemple Manuel Valls, dont les parents sont espagnols).

Sonné, Placé a tweeté :

« Marleix parle de moi à Marseille “notre Coréen national”. Racisme, xénophobie, connerie, beauferie ? On a tout à la fois. »

Il devait ensuite envoyer un communiqué à l'AFP, dont voici la teneur :

« J'ai été adopté en 1975 par une famille normande, naturalisé deux ans plus tard, fait toute ma scolarité, mes études et toute ma vie professionnelle en France.

J'ai travaillé à l'Assemblée nationale, je suis vice-président du conseil régional d'Ile-de-France et même chevalier de l'Ordre national du mérite. Je suis connu pour l'amour que je porte à ma patrie d'adoption et tout ce que monsieur Marleix trouve à dire pour me qualifier c'est “notre Coréen national”.

Cela démontre une fois de plus la “lepénisation” avancée de l'UMP après les propos condamnés de monsieur Hortefeux sur “l'Auvergnat”, le débat scandaleux sur la binationalité porté par l'extrême droite populaire et les attaques indignes d'un Premier ministre de monsieur Fillon à l'encontre d'Eva Joly.

Pour monsieur Marleix, manifestement, seul le sang donne le droit d'être français. C'est une honte qu'un élu de la République puisse tenir de tels propos. »

Cécile Duflot s'en mêle

Fin connaisseur de la carte électorale, réputé pour sa discrétion, Marleix, ancien journaliste diplômé de l'ESJ de Lille, a rapidement rejoint le quotidien gaulliste La Nation.

C'était un proche de Charles Pasqua, dont il a été le conseiller, en 1986, au ministère de l'Intérieur. Depuis une dizaine d'années, c'est le spécialiste du « charcutage électoral » à l'UMP.

Selon nos informations, Cécile Duflot s'apprêtait à demander à Jean-François Copé, le patron de l'UMP, qu'il présente ses excuses. Elles sont venues dans l'après-midi, sur Twitter et lors d'un point presse donné par le secrétaire général du parti majoritaire, à Marseille, devant des journalistes dont l'envoyée spéciale de Rue89 :

« Les propos d'Alain Marleix sur Jean-Vincent Placé sont maladroits. Je les regrette, je les récuse. »

« Nous ne choisissons pas notre pays d'accueil »

Alain Marleix va devoir s'expliquer auprès des familles adoptives et des adoptés qui ne vont pas aimer, mais pas du tout, ce coup bas.

David Hamon, président de l'association Racines coréennes (Association française des adoptés d'origine coréenne), membre du Conseil supérieur de l'adoption, nous a envoyé de courrier dans la soirée de samedi :

« Je tenais à vous faire savoir que les propos vexants, choquants et outranciers tenus par M.Marleix à l'encontre de M.Place ont profondément choqués l'ensemble des Adoptés, coréens et d'ailleurs.

Ces propos sont navrants et inquiétants sur la légitimité de notre lien de filiation.

En matière d'adoption internationale au cas présent, nous ne choisissons pas notre pays d'accueil. Si celui-ci ne nous considère pas comme un de ses citoyens à part entière, où va-t-on ? »

Jointe par Rue89, Geneviève Miral, présidente de l'association « Enfance et familles d'adoption », soupire :

« Une fois de plus, nos enfants sont renvoyés à leurs apparences extérieures, comme si ce qui les définissait exclusivement, c'était leur origine. Et parmi les enfants adoptés de “couleur”, ceux d'origine asiatique ne sont pas épargnés par le racisme. »

Par Rue89

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire